Régulièrement, j’entends, je lis ou je vois des choses qui m’agacent. Cette fois-ci, c’est sur un oucaze lu sur un blog sommant les photographes de ne pas refaire une cliché existant déjà…
Comment tout a commencé ?
Le pitch de départ était celui-ci :
« Pourquoi voudriez-vous faire une photo qui existe déjà ? Et l’afficher sur votre site Web alors qu’elle peut déjà être vue ailleurs ? »
Qu’est-ce que cela sous-entend ? Que si on n’a pas passé des heures à chercher ET trouver un point de vue « original », on n’a pas le droit (moral ?) de prendre cette photo ? Et que, potentiellement, on ne serait pas un Photographe ? Avec un grand P, évidemment.
Si on applique ce principe à notre tour Eiffel nationale par exemple. Un monument connu par des millions de personnes sur terre, qu’on prend en photo sous tous les angles, par tous les temps depuis plus d’un siècle. Moi, je veux bien me casser la tête pour essayer de trouver un cliché nouveau, mais à moins d’avoir accès à un ou des endroits où aucun chasseur d’images avant n’a pu mettre les pieds avec son appareil, c’est impossible. Il faudrait qu’on nous arrêtions tous de shooter notre monument national.
Des vues originales de nombreux emplacements deviennent désormais extrêmement rares. De par la mondialisation et des déplacements, de plus en plus de personnes viennent sur les mêmes lieux. Qui sont donc connus et reconnus. Il ne peut-être question de paresse ou de manque de créativité intellectuels. Il y a une réalité, c’est qu’on a tous envie de prendre en photo certains lieux. De facto, la multiplication des prises de vue fait que la proportion d’inédits se réduit comme une peau de chagrin.
Corollaire, « je suis le premier, c’est mon cliché qu’on doit conserver pour l’éternité »
Et puis quoi encore ? C’est quoi cette idée que je qualifierais de débile ? Chacun a le droit de faire le cliché qu’il veut, comme il veut. On peut le critiquer sur le rendu, l’émotion qu’il va générer. Sur son aspect technique également, que ce serait mal cadré par exemple. Mais pas le fait qu’il a pris une photo au même endroit que moi.
Il s’agit là d’une idée plus que néfaste que je ne puis cautionner. Aussi, je continuerais à prendre mes clichés là où je veux, comme je veux. Et peu importe si des millions d’individus ont fait ou vont faire une photo similaire. Ce qui va compter, c’est que je puisse avoir ma photo, une qui me plait, que j’aurais faite moi, que je pourrais intégrer dans mes albums. Pour cela, je prendrais le temps qu’il faudra afin d’obtenir ce que je souhaite. Il est possible que je fasse plusieurs déclenchements jusqu’à ce que je pense que le bon cliché se trouve sur la carte mémoire.
La préparation
Pour beaucoup, il convient de préparer ses photos. Du moins, les endroits de prise de vue, les angles possibles, tout en tenant compte de la météo, de l’heure de levée du soleil et du degré de brume. J’en connais et ils ont d’une certaine manière raison. On arrive trop souvent sur des sites pollués par une mauvaise lumière ou autre. Ainsi, certains paysages, non éclairés, se révèlent fades, plats. Chose qui serait impossible sans cette préparation.
Évidemment, je ne prépare que rarement mes photos. Mais j’ai d’excellentes raisons pour cela (si, si) :
- La pratique que j’apprécie le plus, c’est la street photography. Et là, aucune préparation n’est nécessaire puisque presque tout est le fruit du hasard. On a un appareil avec soi, on est présent au bon endroit et, surtout, on peut saisir le bon moment, celui qui fait qu’un cliché est correct ou très bon. Voire exceptionnel, mais c’est un peu plus rare.
- Je suis un gros flemmard. Passer du temps sur internet afin de trouver l’endroit idéal pour la prise de vue, ce n’est pas vraiment mon truc. Il me parait préférable de chercher des lieux à photographier que les angles de vues à disséquer. Il m’arrive de regarder des clichés pris par d’autres desdits endroits. Mais cela ne va pas au-delà dans mes recherches. Je ne suis pas trop préoccupé par ceux qui se tenaient là devant moi. Je préfère y aller et faire ce que je peux avec les conditions du moment.
Cela ne m’empêche pas de penser qu’un de ces 4 matins, j’irais bien photographier une tempête en Bretagne. Pour pouvoir le faire, en toute sécurité, je serais obligé de faire un travail d’investigation préalable pour être le moins possible en danger. Et accessoirement, avoir un téléobjectif d’au moins 300 mm !
Il est évident que même si je ne m’efforce pas à reproduire une photo que j’aurais vue, une influence va exister. Sauf que au final, la lumière, l’émotion que je souhaite apporter et plein de divers détails font que ma photo pourra peut-être ressembler à une autre tut en étant différente. Parce qu’elle sera mienne et intègrera ma vision. Le ou les clichés que j’aurais pris et développés seront le reflet de mon désir de créer quelque chose de personnel, que je serais assez fier pour les partager avec vous. C’est sans doute ce qui compte le plus.
Pourquoi ai-je pris une photo au même endroit « emblématique » qu’un million d’autres photographes, sans premier plan ou angle unique ? Parce que je le voulais !