« Être dans le vent est une ambition de feuille morte ». Je ne sais plus qui a écrit cela, mais cela reflète assez bien ce que je pense des engouements du marché. Et pourtant…
Pourtant je suis un geek, du moins l’ai-je été à une époque de ma vie. J’ai donc été sur de nombreux sujets « dans le vent ». Avec l’âge, les choses évoluent, changent et je ne mérite plus cet adjectif. Quand les premiers APN avec un EVF sont apparus, j’ai été enthousiaste. Tellement que le premier APN un peu sérieux que j’ai acheté fut le Minolta Dimage 7i, un bridge. Je ne cacherais pas que j’ai été déçu, extrêmement déçu. Sans doute parce qu’une partie de mon apprentissage photographique s’est effectué avec des reflex ou des Hasselblad.
La déception est venue de 2 points me paraissaient rébarbatifs. Le premier concernait la vitesse de réaction. Le deuxième, l’EVF. Dès que j’ai acheté un reflex numérique, j’ai oublié ces défauts. Alors évidemment, quand l’hybride est apparu, je me suis intéressé à ces nouveaux APN, descendants lointains du Minolta Dimage. Avec quelques remarques sur ces appareils.
Attention, je me suis intéressé aux hybrides Full Frame et pas ceux construits à partir des capteurs micro 4/3.
Hybride ou reflex, la compacité et le poids
L’hybride, un boîtier allégé
Une des principales différences entre un reflex et un hybride se situe dans la façon ces boîtiers gèrent la lumière :
- Le reflex dispose lui d’un miroir sur lequel la lumière rebondit pour atteindre le pentaprisme (pièce en verre qui sert à redresser l’image) puis le viseur. Il y a aussi un obturateur mécanique qui protège le capteur (sur les boîtiers récents, il y a aussi un obturateur électronique).
- L’hybride, lui, a supprimé ces coûteux et lourds dispositifs au profit d’un petit moniteur pour œil, le capteur recevant alors la lumière en permanence, faisant office de caméra. Cette suppression a permis d’alléger le poids du boîtier et de gagner de la place. Il est vrai que la cage du miroir et ce dernier ainsi que le prisme représentent une part non négligeable de ces 2 éléments du boîtier.
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Les hybrides sont donc généralement plus petits et plus compacts que les appareils reflex, mais ce n’est pas la seule différence qui existe entre ces deux systèmes.
Mais des objectifs qui ne le sont pas
Alors que les boîtiers sont plus légers et plus petits, les premiers objectifs proposés sont toujours aussi massifs.
Il y a déjà la tendance moderne de faire des objectifs de plus en plus performants dans tous les domaines (flare, AC, distorsion, etc.). Sans oublier le moteur pour rendre la mise au point silencieuse. Pour se rendre compte du phénomène, il suffit de comparer les formules optiques des FA 50/1.4 et DFA 50/1.4. On y voit une importante inflation du nombre de lentilles qui ont permis de corriger les différentes problématiques de son prédécesseur. En contrepartie, l’image du dernier né est plus définie, plus nette, plus précise, plus homogène…
Autre point qu’il convient de ne pas négliger reste l’augmentation du nombre de pixels des capteurs. La plupart des pellicules argentiques disposaient de 5 à 10 millions de grains argentiques, même certaines (rares) pellicules en avaient 3 à 4 fois plus. Une grande majorité des objectifs des années 80/2000 ont été conçus pour fonctionner avec ces « résolutions ». Les capteurs numériques jusqu’à 12/15 Mpx ont pu s’en accommoder. Désormais, les capteurs disposant à minima de 20 à 28 Mpx, il fallait évoluer. Surtout que les capteurs de 36 à 50 Mpx semblent vouloir se généraliser.
On peut aussi mettre ce phénomène sur le « besoin » des utilisateurs de vouloir disposer d’objectifs toujours plus lumineux. Sans doute un héritage du micro 4/3 ou de l’APS-C pour lequel c’était un moyen de compenser les capteurs plus petits et donc moins lumineux.
L’EVF
De gros avantages…
Les avantages de l’EVF et du système de visée sont assez nombreux. À commencer par le bruit. De très nombreux hybrides ont supprimé l’obturateur mécanique au profit d’un obturateur électronique. Avec comme résultat une absence totale de bruit lors du déclenchement. Très pratique quand être discret est nécessaire (concert classique par exemple). Il est vrai que certaines marques ont tendance à concevoir des miroirs très bruyants.
Mais là où le viseur numérique des hybrides marque une vraie différence par rapport au viseur optique des appareils reflex, c’est dans la possibilité de transmettre des informations pertinentes et de manière dynamique dans le viseur. Certes, certains reflex permettent un affichage d’infos, mais aucun ne permet de faire apparaître en surbrillance les zones surexposées ou sous-exposées. Cet affichage dans le viseur peut s’avérer très complet et customisable selon les besoins des utilisateurs. Un vrai plus qui permet de voir la photo telle qu’elle sera prise.
Si je devais citer un dernier avantage, c’est que les hybrides permettent d’obtenir une mise au point plus précise qu’avec un reflex, même s’il s’avère un poil plus lent. Et encore puisque les progrès logiciels en la matière font bouger les choses. Mais est-ce dû au système AF des boîtiers ou bien du fait de l’absence de vibration récurrente liée au miroir ?
… Mais aussi des inconvénients
- L’alimentation. Un écran en guise de viseur, cela consomme. Beaucoup même. De nombreux hybrides peinent à dépasser les 350 déclenchements. Il est donc fortement conseillé aux photographes utilisant ces boîtiers de partir avec au minima une deuxième batterie, voire une troisième ou une quatrième. Ce que l’on gagne en poids d’un côté, on le perd dans les batteries.
- Plus d’informations, mais moins de visibilité. Le viseur des boîtiers reflex est généralement plus grand et plus confortable que ceux des hybrides. Même si ces derniers se sont nettement améliorés depuis 2018. L’atout des reflex est que l’image affichée dans le viseur est le reflet exact de la réalité. Et donc plus nette, plus lumineuse et de meilleure qualité. Il y a un autre défaut, lui aussi bien atténué avec les dernières générations d’EVF, c’est la réactivité. Parfois on shootait pensant que tous les éléments étaient en place, alors que dans la pratique il y avait au moins 1 s de retard. Avec comme conséquences qu’au moins un des éléments avait changé. Ce qui engendrait une certaine frustration. Aujourd’hui cela va mieux, fort heureusement.
- Impacts sur la vue. A moins sens, il s’agit de l’aspect le plus sensible des EVF. Quelles seront les conséquences physiologiques pour la vue d’avoir un petit écran à 2 cm de l’œil ? Il y a, selon moi, un risque sanitaire que l’on n’a pas levé et qui risque de se révéler désastreux dans quelques années. Au fond, il s’agit de ma grande crainte, celle qui fait que, même si ma marque fétiche en sortait un, je ne me précipiterais pas sur lui. Pas que je me refuse de passer à l’hybride, mais que si j’en avais un, il ne serait pas mon boîtier principal. Peut-être qu’il s’agit d’une crainte sans fondement, mais aujourd’hui, mais trop de doute. J’ai toujours entendu dire que les écrans affectaient la vue d’une manière ou d’une autre, qu’il convenait de les regarder avec un recul qui soit d’au moins 3 fois la taille de l’écran. Est-ce le cas ici ? J’en doute.
Si l’hybride apporte des améliorations importantes et non négligeables en termes de poids du boîtier, de compacités et de prise de vue, il reste de nombreux points négatifs qui font que je comprends la position de Pentax en la matière. Il n’empêche qu’il faut le reconnaître, l’hybride est plus notre futur que le passé. C’est dans ce passé que devrait entrer le reflex, sans disparaître toutefois. À terme le marché du reflex risque d’être un marché de niche, petit, mais bien réel. À moins que l’engouement pour l’hybride ne soit qu’un feu de paille, dû à la nouveauté, et que d’ici 3 ans, la tendance s’inverse à nouveau. À vrai dire rien n’est impossible quant on voit un certain retour de l’argentique.
À suivre…