Bien que pentaxiste dans l’âme, il m’arrive d’avoir la possibilité de pouvoir shooter avec d’autres boîtiers que mon fidèle K-1 (remarque hors contexte, ce dernier va être disponible sur le marché de l’occasion sous peu). Cela varie, suivant les possibilités du moment. Chaque fois que cela sera possible, je ferais un rapide compte rendu dudit matériel. Il y a quelques semaines, ce fut un Canon 5DS, Full Frame de 50 Mpx et fleuron de Canon.
Généralités
Le 5Ds a manifestement été conçu sur les mêmes bases que la famille 5 D, dont le dernier rejeton est le mark IV. Le 5Ds est sorti avant ce dernier. Il s’agit d’un boîtier Full Frame avec un capteur gonflé à 50 Mpx (50,6 pour être précis). Pour digérer les prises de vues, il hérite de 2 processeurs de traitement de données (des DIGIC 6). Malgré cela, la rafale plafonne à 5 i/s, quel que soit le ratio d’image ou de compression choisi.
La compression des RAW est une aubaine. Comme pour le JPEG qui permet des tailles d’images plus petites, Canon autorise le 5Ds à produire des fichiers RAW de taille inférieure, ce qui permet de réduire l’occupation d’espace sur la carte mémoire. C’est ainsi que les modes M-RAW (6480 x 4320 pixels soit 28 Mpx) ou S-RAW (4320 x 2880 pixels soit 12,5 Mpx) cohabite avec le mode RAW normal (8688 × 5792 px soit 50,6 Mpx). C’est extrêmement pratique.
Ce boîtier étant un 50 Mpx, chaque RAW (en version non compressée) pèse environ 70-75 Mo. Gros disque dur pour le stockage à prévoir !
Le 5Ds propose différents ratios d’images, le format APS-H cher à la marque (ratio de 1,3 x), le format APS-C (ratio de 1,6 x) et le format carré. Seul problème, je n’ai jamais réussi à activer la prise de vue au ratio 1:1. Est-ce un bug ? J’ai tendance à penser que l’option existe, mais que c’est lié à l’ergonomie (voir infra). À noter que le viseur dispose d’une aide visuelle quand on utilise ces modes, une partie du champ visuel devenant plus opaque. Je préfère ici le système proposé par le K-1, car ce dernier permet de voir plus facilement ce qui va entrer dans le cadre de la photo (quand il y a un déplacement par exemple).
En plus des modes classiques (P, Tv, Av, M), le 5Ds dispose de 3 modes que l’on peut personnaliser ainsi que du mode Bulb (B). Il y a aussi un mode Auto +, que je n’ai pas testé. Il n’empêche que le mode Auto sur les boîtiers haut de gamme me paraît toujours un peu en contradiction avec l’usage. Même si on croise fréquemment des personnes utilisant des boîtiers à plus de 2000 € uniquement dans ce mode auto…
La mise sous tension du boîtier est située à gauche du viseur et se présente sous la forme d’un levier. Ce qui ne se révèle pas très pratique au final, ma préférence allant vers ce que propose Pentax, à savoir la « couronne » autour du déclencheur.
Le long de l’écran, à l’arrière, il y a plein de touches, certaines ayant une double fonctionnalité. À voir avec l’usage si c’est réellement pratique.
Sa plage d’ISO est faible, allant de 100 à 6400 ISO (50 à 12800 en mode étendu, qu’il vaut mieux oublier). Et en pratique, au-delà de 800 ISO, le 5DS devient moins bon, voir s’effondre littéralement. Certains diront qu’il s’agit d’un appareil de studio, à utiliser sur pied.
Évidemment, il n’a pas de flash intégré, un classique pour certaines catégories de boîtier.
Les aspects positifs
L’autofocus
S’il y a bien un point sur lequel Canon excelle, c’est l’autofocus. Canon dispose sans doute d’un des, sinon le, meilleurs AF pour reflex. Cette marque a un peu d’avance, même si Nikon et surtout Sony ont comblé en grande partie leur retard, Pentax restant pour le moment en deçà. La réactivité est excellente, surtout quand la cible se déplace. Le mode prédictif est très bon, mais s’il est compliqué de mettre le boîtier en défaut, il est possible d’y arriver, surtout quand la personne arrive de face (ou s »éloigne).
Les collimateurs sont nombreux puisque le module AF propose pas moins de 65 collimateurs croisés. Ce module est celui du boîtier pro 1Dx. Il offre tellement de possibilités que le menu dédié ne comporte pas moins de 5 onglets ! Par manque de temps, je n’ai pu me pencher réellement sur toute l’offre. Il serait ainsi possible de régler la sensibilité et l’accélération du suivi, sans compter le changement automatique des collimateurs. Pour comprendre, la lecture du manuel est indispensable. Ainsi que de nombreux tests. Prises de tête garanties.
Les collimateurs étant assez petits, ils sont de fait plus précis, ce qui est un net atout.
Côté colorimétrie
Les images proposées sont propres avec une colorimétrie de base assez juste. Plus que les Nikon qui ont tendance à trop tirer sur le jaune ou Pentax qui a souvent une pointe de magenta en trop.
Attention tout de même, la colorimétrie dans les hauts-iso semble moins bonne, avec une petite dérive jaunâtre (cf. infra).
La tropicalisation
Ce boîtier n’est pas tropicalisé au sens pentaxiste. Néanmoins, il dispose de nombreux joints d’étanchéité au niveau des zones sensibles (molettes, commandes, écran…), ce qui permet une utilisation par temps de légère pluie ou de neige sans crainte particulière.
Les aspects négatifs
Ce boîtier, bien qu’excellant à de nombreux égards, a des points négatifs.
L’ergonomie
L’ergonomie est une notion très importante pour moi. Jusqu’à ce jour, aucun des Canon que j’ai pu tester n’a été à la hauteur. Certes, il y a une roue crantée à l’arrière, qui se place idéalement pour le pouce. Mais en mode Manuel, comment changer les ISO simplement ? Le bouton qui permet de modifier la valeur de l’ISO à l’aide de la molette se trouve à peine à quelques millimètres au-dessus de cette dernière. Ce n’est pas contrôlable facilement. Du moins, si c’est possible, ce n’est absolument pas intuitif.
L’utilisation de l’AF n’est pas non plus aisée. Déjà parce qu’il y a de multiples modes parmi lesquels il faut choisir, ensuite parce qu’il n’y a rien d’instinctif. Heureusement que le joystick arrière permet de modifier rapidement le collimateur… à défaut de ne pas oublier d’enclencher le mode.
Le menu n’est pas en reste. Il faut réfléchir pour comprendre l’absence de logique. Enfin si, il y en a une, mais elle relève plus de l’ingénieur informaticien que du photographe. Si Sony fait largement pire, Canon tient le haut du pavé. Il m’aura fallu une dizaine de minutes pour prendre l’appareil en main et le personnaliser à minima et ainsi m’en servir rapidement. Mais le week-end complet n’a pas été de trop pour parvenir à mieux comprendre certains arcanes. Il faut du temps pour se l’approprier. Ce boîtier mérite d’être apprivoisé pour en tirer la quintessence. La lecture du mode d’emploi est impérative.
Les menus sont relativement bien organisés, informatiquement parlant. Les principales options (dont l’autofocus) sont réparties dans des onglets dédiés.
La finition
La finition du boîtier est plutôt bonne. Il est plus léger que le K-1. Mais, paradoxalement, la préhension du flashgrip n’est pas aussi réussie. Si je porte sans problème à bout de main le couple K-1 + 24-70/2.8, il en fut autrement du 5DS. Très rapidement j’ai eu mal au bout des doigts, et le poids s’est bien fait sentir. Plus que celui du K-1, ce qui est paradoxal puisque le Pentax est plus lourd.
Le bruit du miroir
À moins de shooter miroir levé, le 5Ds est particulièrement bruyant… si l’on compare au bruit proposé par le K-1. Mais il est silencieux comparé à d’autres boîtiers Canon. Pour moi, ce bruit est rédhibitoire et empêche son emploi dans des endroits où ce type de son n’est pas admissible. Comme une salle de musique classique par exemple !
Un mot sur un objectif particulier
Durant ce test, j’ai pu utiliser 3 objectifs différents. Le Canon EF 50/1.2 USM, le Canon EF 85/1.8 USM et le Tamron SP 35/1.8 USD. Si les deux premiers m’ont donné de grandes satisfactions, le Tamron a été décevant. En effet, il produit de très nombreuses aberrations chromatiques, lesquelles ne peuvent être supprimées totalement en Post-Traitement. Il en reste beaucoup trop.
Ce boîtier nécessite de disposer d’objectifs de très grande qualité. Il ne conviendra pas de jouer petit bras et d’y installer des objectifs d’entrée ou de moyenne gamme.
Pentax K-1 vs Canon 5Ds
2 séries d’images de tests vous sont proposées. La première concerne une prise de vue dans des conditions normales, la seconde à 6400 ISO. Le K-1 est utilisé avec le vénérable FA 50/1.4 tandis que le 5Ds dispose du récent EF 50/1.2.
Images à ISO 100 (f/5.6)
Les images ont subi exactement le même traitement (même Bdc, Luminosité +0,45, correction de l’objectif et traitement des AC).




Même si le Canon est censé être plus performant sur le papier, le K-1 est loin de démériter, proposant une image tout aussi agréable et définie, voire même mieux définie et équilibrée. La version Canon est plus lumineuse de manière générale.
Images à ISO 6400 (f/5.6)
Les images sont brutes, sans aucun Post-Traitement ou traitement antibruit.




Le match tourne à l’avantage du Pentax, les détails étant mieux préservés. La colorimétrie est à la fois plus jaunâtre dans les blancs et plus pourpre dans le noir. Le 5Ds n’est pas fait pour les hauts-iso. Dans la pratique, sa plage nominale est comprise entre 100 et 400 ISO, ce qui reste très faible, et il conviendra d’éviter d’aller au-delà de 1600 ISO.
Alors, qu’a pour lui ce boîtier haut de gamme ? Mis à part l’exploit technologique du capteur à 50 Mpx, le 5DS n’est pas un reflex d’exception, car rien ne permet de le distinguer des autres, sans compter que son prix, supérieur à 3500 €, ne le rend pas accessible. Sa seule vraie application reste la photo de studio où il s’épanouira. Dans la rue, en reportage ou pour du sport, le photographe se heurtera rapidement aux limites et regrettera son choix. Il vaudra mieux lui préférer, chez Canon, le 5 D « classique », version mark III ou mark IV.
photos © fyve