Ayant commencé la photographie à la fin des années 70, j’ai appris la photographie et développement avec l’argentique. Essentiellement avec des appareils acceptant les cartouches 110, des Hasselblad au format 6×6 (films 120 et 220) et naturellement des boîtiers reflex aux films 24×36. Sans doute le format le plus « démocratique ». Car si Hasselblad, y’avait sans doute pas mieux vu de ma lorgnette, le 24×36 m’apparaissait comme le bon compromis en termes de qualité/prix.
Pour diverses raisons, je me suis éloigné de la photo jusqu’au début des années 2000. C’est le début du troisième millénaire qui m’a vu y revenir. D’abord avec de petits compacts et des bridges qui m’ont vite énervé de par leurs limitations. Ensuite avec les reflex, APS-C dans un premier temps et Full Frame désormais.
Mais je me rends compte qu’il existe de vraies interrogations dans le choix entre les APS-C et les Full Frame. Lequel des 2 systèmes choisir ? Ce n’est pas si simple, car s’il existe des raisons objectives pour choisir l’un ou l’autre, il y a aussi des raisons plus idéologiques.
Généralités
Il s’agit de se pencher sur les principales similitudes et différences entre les types de boîtiers.
Taille capteur et nombre de pixels
La première différence est la taille du capteur. Il en existe de plusieurs grandeurs. Cela va des tout petits capteurs aux gros utilisés par, les Moyen Format. Cette dimension a une influence directe sur les photos prises. Influence sur la qualité des images ou sur la taille des optiques par exemple. S’il existe des dizaines de tailles de capteurs différentes, on peut dire que 4 tailles se disputent le devant de la scène. Je laisserais de côté les capteurs Moyen Format, cette catégorie d’appareil photo étant assez marginale.
La taille du capteur est un élément important, car c’est lui qui est en charge de « capturer la lumière ». Un capteur est composé de pixels (que l’on nomme aussi photosites). Au début de l’ère numérique, c’était à peine quelques centaines. Désormais, on parle en millions. C’est même une des caractéristiques principales mises en avant par les constructeurs.
Un pixel est une cellule d’un capteur en charge de capter la lumière sous forme de charge électrique, ces pixels sont rangés en lignes et en colonnes. Par exemple, pour une résolution de 24 Mpx, cela représente 4000 lignes de 6000 pixels chacune (6000 x 4000 = 24 000 000 = 24 Mpx).
Si la charge électrique mesurée par chacun des pixels est insuffisante, il ne sera pas possible de la mesurer avec une grande précision. Il conviendra donc de l’amplifier, augmentant ainsi les petites erreurs aléatoires transportées, avec comme résultat, des images « bruitées ». À l’inverse, une charge électrique forte n’aura pas besoin d’être amplifiée pour être mesurée efficacement. Le bruit sera nettement plus faible. En théorie, plus le pixel est grand, plus la charge électrique capturée sera forte et la lumière de meilleure qualité. Avantage donc aux capteurs qui proposent de « grands » pixels.
Les tout petits capteurs
Le plus utilisé des capteurs est celui qu’on trouve dans les smartphones. Des tout petits. Si certains considèrent que la photo au smartphone comme étant de la photo au rabais, ce n’est pas mon cas. On peut faire de très belles choses avec eux…. du moment qu’on connaît leur force et leur limite. Des limites techniques qui se dévoilent principalement quand il y a peu de lumière. Et des limites « artistiques », comme la profondeur de champ.
Pour pallier à ces limitations, les constructeurs ont ajouté soit des capteurs et/ou objectifs supplémentaires chargés de capturer en mode portrait ou en longue focale, soit de l’intelligence artificielle afin d’améliorer la prise de vue et le résultat. Bien souvent, c’est les 2 à la fois. Ainsi, les smartphones à doubles ou triples capteurs/objectifs deviennent monnaie courante. Au final, les smartphones ont gagné la bataille de la photo numérique de ces dernières années, ce qui a provoqué un effondrement du marché global des APN, n’étant pas comptabilisés dans cette catégorie.
Capteurs micro 4/3, APS-C et Full Frame
Que l’on dispose d’un appareil de type hybride ou reflex, depuis l’abandon des Nikon J1 ou des Pentax Q, quasiment tous les boîtiers à objectifs interchangeables sont basés sur ces 3 types de capteurs.
Un capteur micro 4/3, avec sa surface d’environ 225 mm², est plus petit qu’un capteur APS-C (environ 370 mm²), lui-même plus petit qu’un capteur FF (environ 504 mm²). Ce qui veut dire que si vous prenez un capteur de chaque format de 24 Mpx chacun, plus le capteur sera petit, plus le constructeur va être obligé de resserrer l’espace entre les pixels tout en réduisant fortement leur taille. Toujours pour un capteur de 24 Mpx, le capteur micro 4/3 proposera une densité supérieure à 106000 pixels/mm², un capteur APS-C un peu plus 63000 pixels/mm² et un capteur Full Frame, quelques 47600 pixels/mm². Ce qui est problématique d’un point de vue électronique, un bruit supplémentaire se créant.
Micro 4/3 à 24 Mpx | ≈ 13 x 17,3 ≈ 225 mm² | densité ≈ 106 667 pixels par mm² |
APS-C à 24 Mpx | ≈ 15,7 x 23,6 ≈ 370 mm² | densité ≈ 64 865 pixels par mm² |
FF à 24 Mpx | ≈ 24 x 36 ≈ 864 mm² | densité ≈ 27 778 pixels par mm² |
Micro 4/3 à 36 Mpx | ≈ 13 x 17,3 ≈ 225 mm² | densité ≈ 160 000 pixels par mm² |
APS-C à 36 Mpx | ≈ 15,7 x 23,6 ≈ 370 mm² | densité ≈ 97 297 pixels par mm² |
FF de 36 Mpx | ≈ 24 x 36 ≈ 864 mm² | densité ≈ 41 667 pixels par mm² |
On peut donc dire qu’un capteur micro 4/3 de 24 Mpx sera nettement moins performant en termes de lumière et de gestion du bruit qu’un capteur Full Frame disposant du même nombre de pixels.
Le viseur ou le confort de la visée
Le confort de visée fait partie des éléments constitutifs du choix d’un boîtier, qu’on utilise un viseur optique ou électronique. Tous les viseurs ne se valent pas. On va trouver d’un côté ceux qui sont agréables à utiliser, avec un bon confort. Et de l’autre, ceux qui proposent une vision étriquée et souvent peu lumineuse.
Avec une visée optique, les rayons lumineux passent au travers de l’objectif avant d’être réfléchis par un miroir et redressés par un dispositif de type pentaprisme (bloc de verre optique unique, lourd, cher et compliqué à tailler sans défaut) ou pentamiroir (assemblage de miroirs, construit pour agir comme le Pentaprisme, mais moins cher et compliqué à fabriquer). Les deux systèmes sont assez proches en termes de luminosité. Et si un Full Frame a un viseur optique plus lumineux qu’un APS-C, cela provient du fait que le capteur étant grand, le miroir, adapté à cette taille, renvoie plus de lumière captée. C’est aujourd’hui le seul avantage réel du FF sur l’APS-C.
Avec une visée électronique, les rayons lumineux sont captés par le capteur directement et renvoyés sur un petit écran. La luminosité sera donc en principe celle présente effectivement. Nonobstant les réglages du moniteur.
Un bon viseur se doit aussi d’offrir une bonne couverture visuelle car :
- Plus la couverture du viseur s’approche des 100 %, plus il est lumineux, car il y a plus de lumière qui passe au travers du dispositif.
- Plus la couverture approche les 100 %, plus on voit réellement ce qu’il y aura sur l’image finale. On évitera ainsi les éléments indésirables non visibles au moment de la visée.
Le coefficient multiplicateur du champ visuel
Si un 50 mm sera toujours un 50 mm, la focale ne dépendant pas du boîtier, mais de l’objectif, la taille du capteur a une conséquence sur le champ visuel proposé. Ce dernier sera fonction de la focale et de la taille du capteur (de sa diagonale plus précisément). Si la diagonale du capteur change, à focale égale, le champ cadré sera différent. Il y a donc un facteur de conversion, différend selon les capteurs, à appliquer à une focale pour avoir la « focale équivalente ».
- Pour les capteurs 4/3 utilisés chez Panasonic et autres, ce facteur est de 2
- Pour les capteurs APS-C, suivant les marques, le facteur de conversion est compris entre 1,5 et 1,6
- Pour les capteurs MF de type 6 x 4,5, ce facteur est de 0,6
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Quand on utilise un APN équipé d’un capteur qui n’est pas plein format, il convient d’appliquer un facteur de conversion pour connaître la « focale équivalente ». Ce qui implique-t-on doit changer dans sa tête certaines échelles.
Par exemple, si on pratique le portrait, traditionnellement, les focales utilisées sont comprises entre 50 et 120 mm. Sauf que si on utilise un 50 mm et un 85 mm sur un APS-C, on aura comme focale équivalente un 75 mm et un 128 mm. Ce qui n’est pas exactement la même chose. Le photographe sera donc obligé d’utiliser, pour conserver le même rendu visuel, une focale de 33 mm et de 55 mm.
La profondeur de champ
Dans la pratique, le coefficient multiplicateur qui s’applique au champ visuel s’applique également à l’ouverture. Ce qui explique une meilleure netteté coté APS-C, la profondeur de champ étant plus proche de ce que proposerait une ouverture f/2.2 sur un Full Frame.
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En pratique, le photographe qui utilise un Full Frame aura, à ouverture identique, d’une profondeur de champ moins importante qu’avec un APS-C. Les effets de flou très agréable à l’œil seront plus faciles à obtenir. Un objectif pour APS-C, pour parvenir au même résultat, devra proposer une ouverture encore plus grande. Il sera donc plus gros, plus lourd.
À l’inverse, pour la photo d’architecture ou de paysage, les boîtiers micro 4/3 ou APS-C auront l’avantage, une plus grande netteté due à la profondeur de champ plus grande étant proposée.
Selon les situations, la profondeur de champ plus petite ou plus grande sera un avantage ou un inconvénient.
Ma préférence au Full Frame
L’introduction laissait deviner cette préférence vis-à-vis le Plein Format. Si elle n’engage que moi, elle n’en est pas moins partagée par de nombreux autres photographes.
Plusieurs facteurs expliquent cette préférence :
- Une meilleure définition de l’image. À résolution identique, l’avantage est aux grands capteurs par rapport aux plus petits. C’est en grande partie liée au capteur lui-même qui est plus performant, du fait que les photosites sont moins amplifiés. Une part revient aussi aux optiques full frame, plus coûteuses certes, mais aussi plus « piquées ».
- Un viseur plus large. Finis les sensations d’étroitesse quand je vise un objet, une personne, un paysage. J’ai le sentiment de voir plus large. Ce qui n’est pas faux techniquement puisque, le capteur étant plus large, le pentaprisme est plus imposant et l’image proposée dans le viseur en adéquation.
- À ouverture équivalente, la profondeur de champ étant plus faible sur un Full Frame, il est plus facilement d’obtenir des bokeh permettant de détacher un sujet de son fond.
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Un meilleur comportement dans les zones de basse lumière et dans la montée en ISO. Un pixel capture une charge électrique. Plus il est grand, plus cette charge sera importante et moins il sera nécessaire de l’amplifier. Or, quand les conditions de lumière sont insuffisantes, le photographe (ou le boîtier selon le mode de prise de vue choisi) va augmenter les ISO. Cette augmentation va déclencher l’amplification du signal électrique et donc augmenter le bruit déjà présent, rendant peu à peu la photo inutilisable. Les capteurs Full Frame sont généralement plus performants.
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Micro 4/3 vs APS-C vs FF, les + et les –
Toutefois, il ne s’agit pas de décrier les boîtiers APS-C qui restent d’excellents appareils, correspondant de plus parfaitement à certaines activités (comme les pratiques ayant besoin de longues focales). Sans compter qu’un boîtier à capteur APS-C pèsera moins lourd et sera moins encombrant qu’un boîtier plein format. Pour les photographes nomades, voyageurs, et autres photographes voulant rester discrets, c’est un facteur non négligeable ! Voici donc un tableau indiquant les principaux avantages et inconvénients des différents systèmes.
Capteur Plein Format | Capteur APS-C et micro 4/3 | |
Les plus |
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Les moins |
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Sans être intégriste et dire que la « vraie photo c’est au Full Frame », je reconnais que le format 24×36 est celui qui se rapproche le plus de ce que j’aime. C’est la raison pour laquelle j’ai craqué dès que cela a été possible. Dans la pratique, mon boîtier Full Frame est utilisé pour 90 % de mes photos. Sauf que, en vacances, surtout prolongées et/ou dans des pays lointains, j’emporte toujours un second appareil avec moi. Un APS-C. Et ceci pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, il est plus léger que son homologue (300 gr sépare le K-1 II et le KP). Ensuite, tous mes objectifs fonctionnent sur lui et que, même parfois, le facteur multiplicateur du champ visuel peut s’avérer être un vrai plus. Si mon FF va se révéler plus efficace en lumière difficile, voire complexe, mon téléobjectif 70-200/2.8 sur l’APS-C va me proposer un champ visuel comparable à un 135-350, pour un poids moindre et une perte de qualité négligeable. Coté vitesse, il n’est pas en reste, puisque là où le K-1 II est limité à 4,4 img/sec, le KP propose lui jusqu’à 7 img/sec.
Dernière raison, avoir un second boîtier peut s’avérer très utile en cas de cas ou de perte, surtout que ce dernier peut être acheté d’occasion et donc moins cher.
Alors, Full Frame, oui, mais pas que !
Crédit photos & illustrations : © fyve