La tentation est désormais très grande d’acheter un de ces nouveaux Mac Apple Silicon et basculer sur la nouvelle architecture des puces Apple Mx. Ne vous inquiétez pas, vous n’êtes pas le seul. Mais, est-ce une si bonne idée que cela d’acheter un Mac mini, un MacBook Air ou un MacBookPro 13″ dont le cœur est un M1 ? La réponse n’est pas simple.
Et Apple devient concepteur de puces…
En 2010, lors d’une keynote, Steve Jobs lâcha cette phrase : « L’iPad est motorisé par notre propre processeur ». Quelque 30 secondes plus tard, il était passé à autre chose, comme si le premier processeur frappé d’une pomme n’était qu’un détail de l’histoire. Pourtant cela ne l’était pas.
Peu après le passage sous puce Intel en 2006, Apple a commencé a engrangé des compétences en matière d’élaboration de microprocesseur, rachetant ici et là, sociétés, brevets et savoir-faire. 4 ans plus tard, la famille des processeurs Ax, basés sur la technologie ARM, envahissait l’écosystème iPhone/iPad. Au fur et à mesure des versions, les puces Apple Ax sont devenues de plus en plus puissantes. Nombreux ont été jusqu’à considérer que les dernières version (A12, A13 et A14) devaient concurrencer sérieusement les core i7 d’Intel.
Jobs avait-il, de son vivant, initié le passage des Macs à cette architecture ? Des années plus tard, je continuer de penser que le projet Kalamata visant à aboutir à cette migration porte sa signature.
Il aura fallu attendre la fin 2020, mais ce projet est devenu une réalité le 10 novembre. Date où les premiers mac avec un processeur signé Apple ont été mis en vente, vers 20h en France.
Un Mac Apple Silicon aujourd’hui, ce n’est pas une bonne idée
J’attaque fort. Mais pourtant c’est exactement le conseil que je donnerais à tous ceux qui voudraient se précipiter dessus. Il existe de multiples raisons pour lesquelles il convient de raison garder. Dont certaines sont franchement rédhibitoires, croyez-moi. J’ai été des 3 précédentes migrations et il y a eu parfois souvent de la souffrance.
Rosetta 2, ze retour
On a connu cela durant la transition PPC-Intel. Mis à part des logiciels en provenance d’Apple et peut-être de quelques éditeurs tiers, les versions natives des logiciels pour ce nouveau processeur vont être rares dans un premier temps. Parce qu’il faut du temps pour migrer du code. Même si on doit reconnaître que la Pomme a tout mis en place depuis 5 ans pour que les choses se passent proprement. Les applications 64 bits qui n’utilisent plus d’API et autres briques logiciels obsolètes, devront pouvoir sortir une version « Apple M » plus ou moins rapidement.
Mais Apple a trouvé une parade. Certains se souviennent de l’excellente idée que fut Rosetta. Un émulateur capable de créer du code Intel à partir du code PPC. Ce qui aura permis de faire fonctionner des applis PowerPC sur les Macs Intel. Au prix certes d’une grande certaine lenteur et, parfois, de souffrance dans l’attente… Mais au moins, beaucoup ont pu travailler en attendant qu’une version native sorte enfin. Malheureusement certains éditeurs ont pris leur temps.
Avec ce changement d’architecture technique, Apple a ressorti Rosetta, dont la version 2 permettra aux applications mac-intel de fonctionner sur ces nouveaux Mac. Le prix à payer sera sans doute une dégradation des performances plus ou moins importantes. En théorie, les opérations seront moins rapides que si elles étaient exécutées sur votre Mac Intel actuel. Les premiers tests indiquent qu’une vingtaine de secondes supplémentaires seraient nécessaires pour démarrer une application.
Apple promet que Rosetta 2, avec la puce M1, permettra à certaines applications d’être au moins aussi rapide sur les Mac Apple Silicon que sur les Mac Intel… Pour l’instant, je suis dubitatif. Alors toujours tenté ? Les promesses n’engageant que ceux qui y croient, moi, si j’étais vous, j’attendrais que vos logiciels habituels soient disponibles en version native. Ou que de vrais tests aient été réalisés !
Deuxième problème, l’espace disque
On avait connu déjà ce problème entre 2006 et 2010. Les applications universelles capables de fonctionner sous Mac Intel et sous Mac Apple Silicone vont envahir nos disques durs. Sauf qu’ils comporteront du double code, un pour chaque plateforme. Et double code veut augmentation significative de l’espace disque occupée. Un logiciel qui prenait 100 Mo pourrait prendre entre 130 et 200 Mo sur votre SSD. Les premières applications Universelles montrent un embonpoint de l’ordre de 50 % (certaines ressources comme les images n’étant pas dupliquées).
Ce type d’application devrait perdurer quelque temps, sauf si on l’éditeur est intelligent et propose au téléchargement la version correspondant au mac qui en fait la demande.
Néanmoins, c’est un problème qui pourrait s’avérer grave avec un « petit SSD ».
Mais où sont les drivers et autres logiciels spécifiques ?
Ce sera là un obstacle majeur au déploiement rapide des Mac Apple Silicon. Si votre imprimante, scanneur et autres périphériques n’ont pas leurs drivers et autres logiciels adaptés à la nouvelle plateforme, ils ne fonctionneront pas.
Pareil pour certains utilitaires comme CCC (Carbon Copy Cloner), Litlle Snitch, PopChar et autre Dropbox ou logiciels de réparation des DD/SSD. La garantie d’une utilisation sur macOS Big Sur sera-t-elle suffisante ou juste un prérequis ? En théorie, une mise en conformité avec Big Sur et une compilation en natif Apple Silicon avec Xcode 12.2 (encore en bêta) devrait suffire. Mais pour l’instant, il y a encore quelques zones troubles.
Si vous êtes un professionnel et que le 18 novembre votre nouvel ordi refuse de faire fonctionner votre tablette graphique, cela risque de vous faire enrager rapidement. Laisser les geeks et autres amateurs le soin de tester et subir les foudres à votre place. Ce sera mieux.
Mac Apple Silicon, on peut se lancer
Si votre Mac n’est pas votre outil de travail ou si vous avez la possibilité d’investir sans vendre votre matériel actuel, alors il ne faut pas hésiter. Sur le papier, le matériel semble fantastique et les performances promises assez ébouriffantes.
La performance serait là
Depuis le 12 novembre, les tests de benchmark commencent à apparaître. Et ces derniers, comme celui de geekbench pour le MacBook Air, indiquent que la puce M1serait puissante, très puissante, même plus puissante le Core i9 équipant le MacBook Pro 16″ !
Si les tests avec les logiciels corroborent les benchmark, les gains de performances pourraient être très significatifs. J’ai hâte de pouvoir tester en face à face un Mac mini et mon MBPro 16″ à core i9. De plus, il ne s’agit que de la première version de la puce M.
Générosité et petit prix
De plus, Apple semble avoir été généreuse. Les versions de base sont déjà bien pourvues puisque les 3 nouveautés matérielles ont toutes au moins 8 Go de RAM et 256 Go de SSD. Et si Apple optimise l’utilisation de la mémoire de la mémoire façon que sur un iPad/iPhone, alors les 8 Go s’avéreront suffisant dans bien des domaines. On a vu des miracles dans la gestion de la mémoire sous iOS.
De plus, Apple semble avoir été généreuse. Les versions de base sont déjà bien pourvues puisque les 3 nouveautés matérielles ont toutes au moins 8 Go de RAM et 256 Go de SSD. Et si Apple optimise l’utilisation de la mémoire de la mémoire façon que sur un iPad/iPhone, alors les 8 Go s’avéreront suffisant dans bien des domaines. On a vu des miracles dans la gestion de la mémoire sous iOS.
Côté tarif, c’est accessible puisque le Mac mini coûte 799 €, le MacBook Air 1129 € et le MacBookPro démarre à 1449 €. Le passage de 8 à 16 o de RAM est facturé 230 €, comme le passage de 256 à 512 Go de SSD ! Par le passé, j’ai vu Apple être nettement plus gourmande. Possible qu’elle garde la même marge, mais qu’elle se rattrape grandement sur le processeur. Vu qu’elle conçoit désormais ses propres puces, il doit avoir quelques économies d’échelles.
Finalement, il y a déjà de nombreuses applications disponibles
C’est peut-être le premier enseignement, les éditeurs semblent actifs, plus que pour le passage sous Intel.
Affinity devrait proposer prochainement ses 3 logiciels (Photo, Designer et Publisher) en version universelle. Et l’éditeur promet un gain de performances de l’ordre d’un facteur 3. Microsoft Office 365 a passé le cap de la première bêta publique, ce qui mènerait à penser que la version universelle serait disponible avant la fin de l’année. On peut penser que d’ici la mi 2021, la majeure partie des logiciels existeront en version universelle. À l’échelle informatique, c’est demain…
Quid de Windows ?
Mais que vient faire Microsoft Windows dans cette histoire. Il ne faut pas se cacher qu’il existe une frange d’acheteurs qui utilisent leur Mac avec Boot Camp, donc avec Windows. Vous en trouverez beaucoup dans le milieu universitaire… Il sont besoin de logiciels prévus pour cet OS et qui n’ont jamais été portés sous Mac. Mais voilà que Boot Camp ne sera pas porté sur les Mac utilisant les puces Apple M, Craig Federighi indiquant que la voie serait la visualisation.
Sauf que Windows ARM n’est pas vendu aux particuliers et à l’unité directement. La vente est exclusivement réservée aux fabricants. De plus, Parralels Desktop et VMWare ne sont pas encore disponibles, ce ui ne changerait rien à la situation, Windows ARM n’étant pas en vente au grand public directement. Microsoft étant en mesure de s’adapter, ce point pourra évoluer favorablement à l’avenir.
La situation est-elle bloquée ? Non. Il existe une autre solution, celle basée sur Wine. Contrairement aux logiciels de virtualisation qui recrée un environnement Windows complet, Wine traduit les appels de l’API Windows en appels POSIX à la volée, éliminant les pénalités mémoire et de performance d’autres méthodes. Une application Windows est vue alors comme un logiciel Mac, qu’on lance depuis le Finder. Ce qui est assez bluffant.
CodeWeavers a ainsi fait savoir que la version 20.0.1 de son outil CrossOver, basé sur les librairies Wine, fonctionne bien sur les nouveaux ordinateurs sous Apple Silicon. Il permet d’utiliser des logiciels Windows sur Mac pour un coût assez faible (de 40 à 60 €). Ce qui devrait résoudre quelques problèmes.
J’ai craqué et j’ai investi dans un Mac mini version Apple Silicon. Faut maintenant que j’arrive à vendre d’anciens matériels (Mac mini late 2014 et MacBookAir mid 2013). Dans un premier temps, je vais pouvoir évaluer ses performances réelles, aussi bien avec Rosetta2 que des applications natives… Quand elles existeront. Le modèle choisi est celui d’entrée de gamme, avec 8Go de Ram et 256Go de SSD. Un premier retour est prévu la semaine prochaine (test accès disque et Lightroom essentiellement).
La seule chose dont je suis sûr, c’est que un Mac « Apple Silicon » n’est pas prêt de devenir mon mac principal avant quelques mois. Il faudra que toutes mes logiciels existent en version native avant que je l’envisage sérieusement. Et que j’arrive à définir la meilleure stratégie me concernant. Mais cela arrivera.